Lécriture de la saga des Récifs, avec la sortie de ce premier roman est une histoire qui commence il y a trente ans.
Depuis mon enfance, je suis habité par des visions de ce monde infini, de monolithes gigantesques dérivant dans des brumes luminescentes.
Au hasard de mes rencontres amoureuses, je contais à mes amies pour les séduire, cette saga de légende. Et grâce à la magie des mots parlés, nous chevauchions ensemble les dragons démeraude, qui planent entre les corridors basaltiques.
Je me suis toujours senti comme dépositaire de ce monde qui ne demandait quà exister.
Jétais le vecteur, qui lui permettrait de se matérialiser dans limaginaire des hommes, et je souffrais de ne pas pouvoir le faire naître dans notre dimension.
Jamais à cette époque, je naurais imaginé quun jour, jutiliserai, pour le concrétiser, lécriture, ce plus ancien et pourtant puissant médium.
Jai dabord essayé de le dessiner, puis de le mettre en vidéo lorsque jai eu la chance davoir accès à cet outil. Ainsi, entre 1984 et 1986 jai fait deux tentatives pour le mettre en film en utilisant les effets spéciaux vidéo qui en étaient à leurs balbutiements.
Cest à cette occasion que nous avons créé le groupe de vidéastes des Maître du Monde, et où Dominique Pinon me fit le plaisir dincarner un des personnages.
Jétais trop imprégné des habitudes de travail du milieu de la vidéo-création pour me rendre compte de lampleur de la tâche à laquelle je mattaquais.
Le résultat, bien quintéressant ne fut pas concluant en terme de fiction. Dune part faute de moyens, car javais surestimé la capacité de la vidéo à permettre de concurrencer à moindre coût le cinéma.Dautre part du fait certainement de mon inexpérience, à lépoque, de la direction dacteur et de lécriture de scénario.
En 1993, grâce à Pascal Joseph, à qui javais raconté une partie de la légende des Récifs, jeus lopportunité de proposer au groupe Time Warner France den faire un jeu vidéo.
Sous légide dun de leurs directeurs, nous avons créé un groupe de travail composé de programmeurs, et de deux rédacteurs chargés de massister dans lécriture du jeu : Pascal Joseph et Raymond Audemard, qui mavait déjà aidé dans la rédaction de la soirée thématique dArte sur la science-fiction.
Malheureusement, alors que le projet était bien engagé, Time Warner USA supprima Time Warner France. Le jeu ne devait donc pas voir le jour.
Quatre ans plus tard, en ce début dannée 1997, Raymond Audemard qui venait dentrer aux éditions Florent-Massot comme directeur de collection, vint me trouver, et me proposa de faire une série de romans avec mon histoire. Et plutôt que de lécrire lui-même sous ma direction, comme javais lhabitude de faire pour la plupart de mes films, il insista pour que ce soit moi-même qui lécrive, présumant avec confiance, ou inconscience que jen serai capable.
Le contexte était favorable, je travaillais régulièrement aux bandes annonces de la Cinquième, ce qui me donnait la possibilité financière dinvestir du temps dans lécriture.
Deux ans plus tôt, jétais dans une telle détresse économique et morale que ceut été une aventure impossible.
Lécriture du roman me prit quatre mois, en fait un peu moins de trois mois à plein temps.
Je mentirai en disant que ce fut facile.
Jai dabord collecté mes anciennes tentatives littéraires, dont certaines dataient de mon enfance, et je les ai réorganisées en essayant de leur donner une cohérence.
Jai puisé également dans des textes autobiographiques que javais écrits pour évacuer des moments difficiles de ma vie, ou dans des grands moments dexaltation amoureuse ou érotique.
Jai beaucoup manipulé ce patchwork, coupant par ci, développant par là, au gré de linspiration, guidé dans mes choix par les conseils efficaces de Raymond.
Une fois la cohérence donnée, je suis revenu mainte et mainte fois sur le texte, en laméliorant du mieux que je pouvais, et je crois que si Raymond ne mavait pas arrêté pour pouvoir léditer, je serai encore en train de le modifier.
Bien quil soit perfectible je suis content de ce premier roman. (Très content).
Dune part parce que cest une chance extraordinaire de poser la première pierre dune série que je pense longue, dautre part, parce que, même pour moi, il y a du mystère dans ce que jai écrit.
Lécriture ma fait replonger dans des profondeurs que je croyais oubliées, et jai ressuscité ce monde que je pensais à jamais perdu. Je ressens de nouveau lexaltation qui mhabitait dans mon enfance, lorsque ces visions simposaient dans mon esprit.
Les dragons impatients se pressent derrière la porte, et je dois les contenir pour quils ne me submergent pas.