Les Robots
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Ce texte est composé à partir du synopsis de mon documentaire "Sous le règne d'Héphaïstos" pour La Cinquième. , et de l'histoire des robots pour la borne interactive du musée du CNAM.

ETYMOLOGIE


Robots travailleurs et esclaves, même combat!

Les robots ou hommes artificiels, vont porter plusieurs noms au long de l’histoire:
Sculpture de métal dans la mythologie grecque (Héphaïstos), statue d’argile animée dans la mythologie mésopotamienne ou Golem dans la tradition juive reprise par le romancier Gustave Meyrinck,
Ilote à vapeur pour Théophile Gautier au XIXe siècle,
le terme de « Robot » n’apparaissant que très tardivement en 1921, sous la plume du romancier tchèque Karel Capek.
Il est intéressant de noter que Robot en tchèque signifie travail forcé ou tâche pénible. Si on remonte l’étymologie et qu’on regarde d’où vient le mot travail, on s’aperçoit qu’il vient du mot Tripalium qui était l’instrument de torture romain utilisé pour punir les esclaves rebelles. La boucle est bouclée. Robot = travail = esclave = robot.
La notion d’esclavage est donc présente en subliminal si on peut dire, derrière à la fois la notion de Robot, mais aussi derrière la notion de travail, de quoi méditer par rapport à une société qui considère le travail comme une forme d’accomplissement social. Rappelons-nous que les citoyens chez les grecs, pères fondateurs de la démocratie n’avaient pas le droit de travailler, car cela les aurait empêché de s’occuper correctement du fonctionnement de la cité.

LA PRÉHISTOIRE

L'homme de la préhistoire s'empressa très tôt d’inventer des extensions technologiques de ses membres afin de faciliter son travail, comme la massue par exemple qui est un prolongement de la main.

Ces premiers outils trouveront leur aboutissement plusieurs millénaire plus tard, dans les robots qui sont d'une certaine façon un prolongement de notre corps entier.

LA MYTHOLOGIE

Dans l’imaginaire de l’humanité, les premiers robots, c’est nous.

Les tablettes mésopotamiennes déterrées par les archéologues et qui remontent à des millénaires, nous racontent cette histoire :

Les dieux vivaient entre eux, dans une société inégalitaire.
La majorité travaillait, pour le compte d’une élite oisive.
Un jour, les travailleurs divins, se jugeant exploités, se révoltèrent.
Le dieu des techniques proposa alors qu’on fabrique des pantins doués de vie, qu’on mettrait au travail à la place des dieux.
Ce furent les hommes.
Pour que ces esclaves ne puissent se révolter, on les fit nettement inférieurs aux dieux, et voués à la mort.

Plus tard dans la genèse, l'homme et la femme furent créés par dieu.

L’EGYPTE

Certaines statues de dieux Egyptiens retrouvées dans les tombeaux sont articulées, comme ce masque d'Anubis dont la mâchoire est mobile.
Certains chercheurs n'hésitent pas à y voir les ancêtres de nos automates

HÉPHAISTOS

A part l'homme qui selon la religion chrétienne est une créature artificielle créée par dieu, les ancêtres des robots sont aussi présents dans la mythologie grec et romaine. Ainsi l’antiquité fourmille de statues parlantes, ou animées décrites par de nombreux auteurs.


La forge d'Hephaistos
Selon le chant XVIII de l'Iliade (Homère, VIIIe siècle avant J.C.) Héphaïstos fut le premier fabricant de créatures artificielles "techniques".
Homère y décrit des tables circulaires sur trois pieds, munies de roues. Autonomes, elles se rendaient seules vers l'Olympe pour y transporter les produits de la forge d’Héphaïstos.

Héphaïstos s’était également construit deux servantes en or qui l’assistaient dans ses travaux, Homère précise même qu'elles pouvaient parler et penser.
Héphaïstos, fils de Zeus et d’Héra, époux d’Aphrodite, dieu de la technologie chez les Grecs, est plus connu sous son nom romain de Vulcain, dieu des forgerons.

TALOS

Mais les robots incarnent aussi, dans les mythologies, une image de puissance et d’immortalité.

Talos dont la fabrication est attribuée soit à Dédale, soit à Héphaïstos, était une statue de bronze, qui défendait la Crète du roi Minos.

Pour lutter contre les envahisseurs, Talos portait son corps à incandescence dans un incendie qu’il avait lui-même déclenché, et embrassait les ennemis du roi dans une étreinte fatalement chaleureuse.

C'est également Talos, qui jette des rochers sur le vaisseau du héros Ulysse pour tenter de le couler.

Heureusement, le monstre a UN point faible, qu’il suffira d’atteindre pour le détruire: sa cheville.

Dans ces histoires, ce sont les dieux, qui sont les artisans créateurs.

Pour les auteurs du dictionnaire des symboles, Dédale, constructeur du labyrinthe et des ailes d'Icare, représente le technocrate, l’apprenti sorcier maquillé en ingénieur qui ne connaît pas les limites de son pouvoir.

PYGMALION

Ovide, dans ses Métamorphoses, conte l’histoire de Pygmalion, roi légendaire de Chypre et sculpteur de talent.
Las de ne pas trouver chez les femmes la beauté qu’il recherchait, il créa une statue d’ivoire (ultérieurement dénommée Galatéa) image de la perfection esthétique, et en tomba amoureux. Sensible à ses supplications la déesse Aphrodite insuffla la vie à la statue.
Le thème du créateur amoureux de sa “chose” sera repris, entre autres, par l’écrivain irlandais George Bernard Shaw (1856-1950)-Pygmalion (1913) adapté au Cinéma par George Cukor sous le titre My Fair Lady-, puis par l’écrivain de science-fiction Edmund Cooper avec Pygmalion 2113 (double hommage, au mythe et à G. B. Shaw).
L’automate, puis le robot, objet d’amour ( L'Homme au sable de E.T.A. Hoffman) va se muer en fantasme sexuel (Et quand je vous fais ça, vous sentez quelque chose ? de Robert Sheckley, La Semence du démon de Dean R. Koontz-au cinéma Génération Proteus-, Ranxerox, BD de Liberatore et Tamburini).
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HERON

Ancêtres de la robotique contemporaine, les systèmes mécaniques et Hydrauliques de l’école d’Alexandrie sont sans doute les premiers systèmes de régulation.
C’est aux alentours des VIe et Ve siècles av. J.C. que le machinisme se développe réellement en Grèce, grâce à des techniques venues du Proche-Orient.
Ce seront surtout des recherches appliquées aux machines de guerre et les instruments de levage, avec des ressorts, des leviers, poulies et moufles destinés à démultiplier l’effort animal ou humain, jusque-là mesure et limite de toute chose.
Ces nouveautés dans les domaines de la mécanique et de l’hydraulique, donneront naissance à plusieurs innovations technologiques par l’école d’Alexandrie au IIIe siècle AVJC dont on trouvera la concrétisation contemporaine dans l’automatique et la robotique : mécanique et engrenages (en bois, puis en métal précieux), cylindres et pistons, pompes, instruments de mesure (clepsydres), arbre à cames, systèmes de régulation automatique (pressoirs à leviers et à contrepoids).

Quelques noms ont traversé les siècles : Ctésibios, Héron d’Alexandrie, Philon de Byzance et un certain ArchimèdeÉ
Ctésibios (ou Ctesibius), était barbier à Alexandrie (IIIe siècle av. J.-C.) est resté dans l’histoire pour ses travaux sur les clepsydres, ou horloges hydrauliques, objets fonctionnels mais aussi Ïuvres d’art mettant en scène des sculptures automates animées par le mouvement de l’eau.

Temple d'Heron
Héron d’Alexandrie (125 av. J.-C.) créateur d’automates mus par l’eau, s’intéressa également à la vapeur et à l’air comprimé. Connu pour les machineries décrites dans son Traité des pneumatiques, on lui doit par ailleurs un projet de machine destinée à ouvrir automatiquement les portes d’un temple.

SPARTACUS


On l’a vu, le nom de robot fait référence à la notion de travail, et le mot travail fait référence étymologiquement à la notion d’esclavage.
L’archétype de la révolte des robots qui se développera à travers la littérature (Ignis de Didier de Chousy, R.U.R., de Karel Capek) puis dans le cinéma (Métropolis, Blade Runner) à partir du XVIIIme siècle ne fait somme toute que décrire sous une nouvelle forme la révolte de Spartacus qui mena la plus grande rébellion d’esclaves de la période romaine, de 73 à 71 av. J.C.

L'EMPIRE DU MILIEU

Horloges et sismographes

L’Empire du Milieu, autrement dit la Chine, n’est pas resté à l’écart de la recherche en automatique.
Dès l'antiquité, on peut y découvrir des horloges à encens, des clepsydres ordinaires (fonctionnant à la manière des sabliers), et des clepsydres polyvasculaires (avec écoulement régulier de l’eau). Plus complexes sont les sphères armillaires équatoriales (assemblage d’anneaux ou de globes figurant les mouvements célestes) de Guo Shouchang (52 av. J.-C.), ainsi que celle de Zhang Heng (vers 124) inventeur d’une machine astronomique formée par un globe céleste couplé avec une clepsydre et du premier sismographe de l’histoire.
Vers 1090 dans la ville chinoise de Honan, Su-Sung aurait construit une horloge astronomique de plus de 12 m de haut, actionnée par une roue hydraulique. Une série d’automates symbolisaient l’écoulement du temps en apparaissant dans des niches où ils frappaient des gongs.

© Yann Nguyen Minh, Raymond Audemard, CNAM, 1997




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