On trouve entre lauteur et son vidéogramme, la même dialectique qui lie le peintre à son tableau. Chaque intervention sur limage modifie loeuvre et modifie aussi lintention de lartiste.
Le vidéogramme et le réalisateur sont donc intimement liés pendant le temps nécessaire à laboutissement de loeuvre, ils forment ensemble un être composite éphémère en constante mutation pendant toute la durée de la réalisation.
Une fois terminée loeuvre échappe à son créateur, elle acquiert une autonomie propre, mais elle est investie dune charge émotionnelle particulière. Charge, qui se libère à chaque rencontre avec un spectateur.
Comme une bactérie fossile, qui revit une fois extirpée de sa gangue millénaire : soumise aux feux de lesprit, loeuvre renaît ; elle retrouve une parcelle de la vie qui la animée lors de sa création. À chaque rencontre, elle renaîtra différente.
Dans un poème, il faut se laisser envoûter par son rythme, par sa musique, par la succession de chimères engendrées par la poésie dans lesprit.
Lorsque sa lecture est terminée, loeuvre a suscité en nous la naissance dune image mentale nouvelle, elle a tissé son écheveau arachnéen, reliant entre elles des émotions isolées ou secrètes.
De même un vidéogramme fait appel à des processus de perception et de compréhension similaires. Il faut le laisser se dérouler dans sa totalité, se laisser emporter par les images, savourer son rythme, son mystère.
Il ne parle pas au conscient, mais à linconscient. Cest un moment partagé, une seule émotion fragmentée, dont les éléments sassemblent petit à petit pendant ce bref parcours, où le spectateur et le film vont cheminer ensemble le long du fleuve du temps.
Une fois terminé, il laisse une empreinte tactile sur lesprit, cest le trahir de vouloir à tout prix en extirper une signification, un sens, un contenu. On laccepte ou on le rejette.
Les poèmes sont à la littérature ce que lart vidéo est à la télévision.