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1738, VAUCANSON


Au XVIIIe siècle se développe une nouvelle vision de l’automate qui, au delà de l’apparence, prétend copier les mécanismes biologiques.


Le hardi Vaucanson, rival de Prométhée,
Semblait, de la nature imitant les ressorts,
Prendre le feu des cieux pour animer les corps.
(Voltaire)


Jacques Vaucanson, né à Grenoble en 1709, fait à la fois des études de mécanique et d’anatomie, rien d’étonnant à ce qu’il souhaite combiner les deux. Il n’a que 23 ans quand il imagine de construire des mécanismes reproduisant fidèlement les fonctions vitales.
Certainement influencé ou partageant la pensée de Descartes qui compare l’homme à une machine, Vaucanson, veut construire des machines reproduisant les principales fonctions de la vie : respiration, digestion, circulation sanguine. Ses automates les plus célèbres se veulent des reproductions de moyens en vue d’obtenir l’intelligence expérimentale d’un mécanisme biologique.

En 1738 son joueur de flûte exécutait les mêmes opérations qu’un joueur vivant (souffle, lèvres, doigts).

En 1739, Vaucanson présente un Joueur de tambourin et de flageolet et surtout son célèbre Canard digérateur, qui fera sa renommée.
Son canard bat des ailes, mange du grain, le digère et défèque des petites crottes. On le voit, Vaucanson avait un humour très provocateur, qui n’est pas sans rappeler celui de l’artiste Nam June Paik quelques deux siècles plus tard avec sa sculpture robot arpentant les rues de New-York en 1962 qui défèque également. Ce sont, je crois les seuls exemples de robots dotés d’un intestin de l’histoire.
Mais si le mouvement des ailes du canard de Vaucanson est un chef-d’Ïuvre de simulation anatomique, la digestion n’est qu’une habile supercherie qui sera découverte et dévoilée en 1844 par le prestidigitateur Robert-Houdin.

Vaucanson présente en 1741 le projet - qui ne pourra aboutir en raison de l’insuffisance des moyens techniques de l’époque - d’une figure automate qui imitera dans ses mouvements les opérations animales... Et pourra servir à faire des démonstrations dans un cours d’anatomie.

Il construira tout de même un automate à circulation du sang muni de tubes de caoutchouc.

Jean-Baptiste Le Cat (1700-1768), chirurgien de l’hôtel-Dieu de Rouen expose en 1744 le projet d'un homme artificiel ou automate où il espère faire voir toutes les opérations de l’homme vivant.

En 1746, Vaucanson invente un métier à tisser automatique et en 1750 un système de régulation d’une machine en mouvement.

On peut citer également Steiner et son Joueur de trompette (1748), Defrance et ses bergers (1766), l’autrichien Frederik von Klaus qui construira plusieurs écrivains, dont le plus célèbre (1760) est capable d’écrire 107 mots.

Le baron de Kempelen, bien connu pour son (faux) Joueur d’échecs, tente en 1779 de produire artificiellement des voyelles. Il construit à Vienne une machine parlante, dans laquelle une anche vibrante excitait des cavités de forme variable.

LES JACQUET-DROZ
Les suisses Pierre Jacquet-Droz (1721-1790) et son fils Henri (1752-1791) utilisent à merveille les progrès de l’horlogerie pour créer de splendides automates, parmi lesquels un enfant écrivain dont le mécanisme dissimulé dans le corps permet de lui faire écrire des textes courts. Parmi leurs créations figurent également un dessinateur et une musicienne
L’écrivain des Jacquet Droz est d’ailleurs le premier exemple d’appel de sous programme avec l’adresse de retour intégrée dans le programme, pour effectuer le dessin élémentaire de chaque lettre du texte composé. (Cf. Gérard Verroust)

1779, LE JOUEUR D'ÉCHECS
En 1777 à Toula, en Russie, un viennois, le Baron de Kempelen, présente un automate joueur d’échec qui entrera dans l’histoire sous le nom de l’un de ses futurs propriétaires, Léonard Maëlzel. Il représente un Turc, grandeur nature, assis derrière un coffre dont on pouvait apercevoir l’intérieur traversé de rouages et de ressorts. Sur le coffre, un échiquier.
En fait de mécanisme génial, il s’agissait d’une supercherie destinée à faire évader de Russie un officier polonais rebelle amputé de ses deux jambes, nommé Worousky. Robert-Houdin le démontrera plus tard.
De même, Edgar Alan Poe, dans un article publié en 1836 (Le joueur d’échec de Maëlzel), démonte la supercherie en analysant méticuleusement le rituel de présentation du joueur d’échec au public. Rituel au cours duquel la personne dissimulée dans le coffre gagnait le corps de l’automate.

Le XIXe siècle voit le déclin de l’automate malgré quelques belles réalisations comme le Componium (orchestre mécanique) de Koppen (1829), les canards de Jean Rechteiner (1838), Le Joueur de gobelets et La leçon de chant de Robert-Houdin (1839).


© Yann Nguyen Minh, Raymond Audemard, CNAM, 1997


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