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LE CHEF DU VILLAGE

Vers le mois de mai 1947, on a reçu l'ordre du QG de participer à une opération, notre groupe était intégré avec d'autres éléments, qui venaient d'arriver, une centaine de soldats avec des half-tracks, commandés par un capitaine que j'ai du accompagner comme traducteur.
Ils ont encerclé un village et une dizaine de minutes avant d'entrer, avec un haut-parleur j'ai averti les habitants qu'ils devaient rester chez eux, que s'ils sortaient ils se feraient tirer dessus.
Nous sommes allés voir le chef du village et le capitaine par mon intermédiaire lui a demandé ce qu'il savait du passage de troupes Viêt-Minh dans son village.
Le chef m'a répondu qu'il ne savait rien. Lorsqu'il a entendu tirer il s'est couché à plat ventre dans sa paillote.
Lorsque je lui ai traduit la réponse du chef du village, le capitaine a sorti son pistolet:
«Dis lui que s'il me dit pas combien ils étaient, et dans quelle direction le Viêt-Minh est parti, je lui brûle la cervelle.»
Le chef du village se mit à genoux pour me supplier:
«Je vous en supplie intervenez pour moi, intervenez pour que le capitaine ne me tue pas, parce que je vous jure sur la tête de mes enfants que je ne sais pas du tout par où passe le Viêt-Minh, Je vous en supplie aidez moi, monsieur, aide moi aide moi pour que le capitaine ne me tue pas, aidez moi, je suis innocent de part et d'autre vous êtes tous armés, que ce soit le Viêt-Minh ou les troupes Française, moi je suis entre les deux et je suis innocent.»
Il me suppliait d'implorer la clémence de l'officier, mais j'avais à peine terminé de traduire sa supplique que le capitaine a tiré, il a tué le chef du village d'une balle dans la tête.

J'étais très choqué, je ne pensais pas que le capitaine allait mettre sa menace à exécution. Le fait d'exécuter quelqu'un de sang-froid, m'a fait revivre la façon dont mes camarades avaient été tué devant moi un an plus tôt.
De retour au poste, j'ai raconté les détails de la scène à Leuleu, qui m'a dit:
«Paul, tu ne pourras plus rester ici maintenant, ça va aller de plus en plus mal, tu as dix-sept ans et il faut que tu partes poursuivre tes études quelque part.»


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